Drapeau du Québec Source d'information sur les OGM

Coexistence des cultures avec et sans OGM

La coexistence implique l'utilisation parallèle de systèmes de cultures avec et sans OGM.

... travaux au Québec

Au Québec, des travaux ont regardé la coexistence des OGM avec les autres cultures (conventionnelles, biologiques, à identité préservée, sans intrant).

En 2018, un portrait de l’offre et de la qualité de semences génétiquement modifiées, non-génétiquement modifiées et biologiques pour le maïs-grain, le soya et le canola au Québec a été publié21.

La Commission de l’éthique en science et en technologie s’est penchée sur le sujet dans son avis Pour une gestion éthique des OGM Cet hyperlien s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre..

Méta-analyse sur le flux de gène

Une équipe de chercheurs de l’Université Laval a effectué une méta-analyse sur le flux de gènes du maïs GM, du canola GM et du soja GM. L’objet de cette étude était de dresser un portrait détaillé de la littérature scientifique sur la question des flux de gènes en provenance des lignées végétales GM cultivées au Québec. Une revue systématique de la littérature relative aux flux géniques a d’abord été réalisée pour le maïs, le soja et le canola afin de résumer, d’une part, l’état des connaissances sur la question et d’identifier, d’autre part, les études utiles pour la méta-analyse, et les questions pertinentes en pratique pour la mise en place de stratégies de déploiement des cultures GM facilitant la coexistence des systèmes agricoles transgéniques et conventionnels. 743 publications scientifiques ont été répertoriées sur ce sujet.

Les analyses confirment dans l’ensemble les conclusions tirées d’études antérieures sur la question des flux géniques et l’efficacité des modes de confinement souvent considérés pour en minimiser l’incidence. Elles confirment aussi la pertinence des indicateurs développés depuis quelques années pour la définition des stratégies de confinement des transgènes et le suivi de leur efficacité en milieu ouvert.

Ils mettent aussi en lumière des aspects de la question peu traités jusqu’ici, et soulignent l’importance d’études standardisées, dans les années à venir, pour une prise en compte plus formelle de questions spécifiques adaptées au secteur agroalimentaire québécois12.

... travaux au Canada

L’association canadienne du commerce des semences (ACCS) a publié sur son site Internet, un plan de coexistence pour l’introduction de la luzerne GM dans l’est du Canada9 10.

Avec l’arrivée de la luzerne GM au Canada, l’ACCS a voulu que son plan de coexistence établisse des directives et des meilleures pratiques de gestion (MPG) qui, lorsqu’elles seraient suivies, permettraient aux producteurs de semences et de cultures d’établir ou de maintenir les systèmes de production qui servent le mieux leur exploitation de même que leurs marchés actuels et futurs. Ce plan contient également une liste de vérification détachable pour aider les agriculteurs à suivre les MPG sur leur ferme et à les consigner. L’ACCS estime que son plan permettra aux trois types de cultures (conventionnelle, biologique et GM) de coexister.

Les MPG proposées par l’ACCS touchent les sujets suivants :

  • l’importance de la tenue de dossier;
  • des moyens de prévenir la présence adventice (PA) de luzerne GM dans la luzerne non-GM lors de la plantation, de la récolte et de l’entreposage;
  • des suggestions pour diminuer le risque de PA découlant du flux génétique;
  • et comment éliminer d’éventuelles repousses spontanées de luzerne GM.

Certains groupes ont critiqué le plan de coexistence de l’ACCS. Ils questionnent l’applicabilité des mesures proposées, estiment qu’il n’est pas possible de prévenir que la luzerne GM se répande dans les fermes et les champs avoisinants et que le cadre législatif requis pour le soutien du système de surveillance n’est pas adéquat11.

... travaux en Union européenne

En 2002, le Joint Research Center (JRC) travaille sur une série d’études de cas portant sur le besoin de mesure de coexistence pour le maïs, les graines oléagineuses et la pomme de terre. Dans son rapport, le consortium JRC/ IPTS-ESTO 13 conclu que le besoin de mesures de coexistence dans l'UE n'était pas général et dépendait du paysage agricole (taille, forme et positions relatives des parcelles GM et non GM), des typologies de la ferme et des cultures considérées.

En 2003, la Commission européenne a recommandé 14 un ensemble de lignes directrices visant à appuyer le développement législatif national et la mise en place de stratégies de coexistence. La liberté de produire des cultures GM pouvait alors être restreinte pour empêcher une contamination transfrontalière dans le cas où les états limitrophes auraient interdit les cultures GM.

En 2006, le conseil des ministres de l’Agriculture a commandé la tenue de travaux visant l’établissement de lignes directrices, y compris de mesures de coexistence plus spécifiques 15.

En 2006, le JRC publie un autre rapport portant sur des études de cas chez le maïs, la betterave à sucre et le coton. La coexistence dans la production de semences serait techniquement possible pour un seuil de 0,5%, avec peu ou pas de changements dans les pratiques actuelles. Pour le maïs, cela est réaliste pour la coexistence entre la production de semences GM et non-GM. Cependant, la coexistence de la production de semences de maïs non GM avec des cultures de maïs GM nécessiterait des changements dans les pratiques actuelles, à savoir l'introduction de distances d'isolement plus importantes (des distances actuelles de 100-200 m à 400-600 m). Si la présence de substances GM dans les semences ne dépasse pas 0,5%, la coexistence dans la production végétale est techniquement réalisable pour le seuil cible de 0,9%. Le rapport évalue également les mesures de coexistence jugées les plus efficaces et les modèles de flux génique. Les tableaux de décision inclus dans ce rapport sont présentés comme des outils pour aider les décideurs à mettre en place des stratégies de coexistence 16.

En 2007, la Commission européenne a déterminé les parts de responsabilité de chacun des acteurs en cas de présence adventive d’OGM dans des cultures non GM 17.

En 2009, une mise à jour des mesures nationales de coexistence est publiée. Lors de sa publication, 15 États membres avaient adopté une législation spécifique pour encadrer la coexistence (AT, BE, CZ, DE, DK, FR, HU, LT, LU, LV, NL, PT, RO, SE, and SK) 18.

Entre 2010 et 2015, l’absence de consensus entre les États membres et la multiplication des actes de résistance ont mené à un statu quo quant à la coexistence des différentes régies de culture au sein de l’Union européenne 19.

Le 11 mars 2015, les États membres ont obtenu le droit de demander l’exclusion de certaines parties de leur territoire lors du processus d’approbation (ou de renouvellement) des cultures GM. En cas d’opposition à cette demande, l’État membre doit démontrer de façon rationnelle et non discriminatoire que la culture GM en question contrevient aux objectifs de ses politiques agricoles, environnementales, ou qu’elle aurait un impact négatif sur le plan sociodémographique, nuirait à son développement territorial ou que la ségrégation des produits GM et non GM ne pourrait être maintenue 20.

La Commission administre COEX-NET (Network Group for the Exchange and Coordination of Information Concerning Coexistence of Genetically Modified, Conventional and Organic Crops) pour favoriser l'échange d'informations sur les résultats des études scientifiques ainsi que sur les meilleures pratiques développées dans les stratégies nationales de coexistence entre les États membres et la Commission.

La commission a également mis en place le Bureau de la Coexistence de la Coexistence européen.

Des travaux importants sur cette question ont été réalisés en Union européenne (UE). Un programme spécial de recherche a été instauré. Ce programme intitulé Co-Extra (GM and non-GM supply chains : their CO-Existence and TRAceability) a duré quatre ans et demi, a rassemblé plus de 200 scientifiques de 52 organismes différents venant de 18 pays de l'UE et d'ailleurs.

Les thèmes de recherche du programme Co-Extra étaient :

  • l'impact économique de la coexistence et de la traçabilité;
  • la caractérisation des filières;
  • la documentation et la traçabilité;
  • les aspects légaux de la coexistence et de la traçabilité;
  • la dynamique des mouvements de pollen;
  • les approches biologiques pour prévenir le flux génique;
  • l'analyse de la présence des OGM (échantillonnage, amélioration des méthodes de détection PCR, détection des OGM non autorisés, méthodes de rechange).

Le rapport final de leurs analyses est disponible sur le site Co-Extra. Cet hyperlien s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre.

L’ensemble des résultats de Co-Extra ont été également mis à jour dans un livre spécial intitulé «Genetically Modified and Non-Genetically Modified Food Supply Chains: Co-Existence and Traceability» 4.

... travaux en Suisse

Le Fonds national suisse (FNS) a financé un Programme national de recherche (le PNR59) sur l’«Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées». Le rapport final a été publié le 28 août 20125 6. Ce rapport met en lumière les résultats de 30 projets de recherches menés entre 2007 et 2011 et de l’analyse de milliers d’articles scientifiques internationaux.

Un des aspects couverts par ce programme de recherche est « les enjeux socio-économiques, les coûts et les avantages de la coexistence OGM et non-GM». Selon les chercheurs7, la coexistence des cultures GM et non-GM est possible dans un pays structuré en petits espaces telle la Suisse, mais suppose une adaptation de leur Loi sur le génie génétique. Les profits et les coûts de coexistence s’équilibreraient. Comme moyen de diminuer les coûts associés à la coexistence, les auteurs du rapport suggèrent aux exploitants agricoles de se concerter.

Ils estiment que la coexistence des cultures GM et non-GM impose quatre défis principaux aux décideurs politique :

  1. définir la pertinence des distances d'isolement entre les champs GM et non-GM;
  2. vérifier la faisabilité des distances d'isolement sans mettre en péril la liberté de choix des agriculteurs;
  3. tenir compte de la variabilité et des différences de l'agriculture dans les régions;
  4. tenir compte des incitations économiques pour des marchés OGM et non-GM.

... travaux aux États-Unis

Un Comité sur la biotechnologie et l’agriculture au 21e siècle du Département de l’agriculture américain (USDA Advisory Committee on Biotechnology and 21st Century Agriculture ­ AC21) a publié le 19 novembre 2012 un rapport sur des moyens d’améliorer la coexistence entre les OGM et les autres cultures8.

Ce rapport traite des mesures à prendre pour faciliter la coexistence entre les différents types de productions agricoles et des mécanismes de compensation possibles pour les agriculteurs dont la valeur de leurs récoltes est réduite par la présence non intentionnelle de matières GM.

Le comité AC21 croit que l’agriculture américaine est diversifiée et qu’il est important de promouvoir la coexistence entre les différents secteurs agricoles. Les agriculteurs américains ont le droit de faire les meilleurs choix pour leur ferme, incluant le choix de cultiver des plantes GM, des cultures à identité préservée, des plantes conventionnelles et des pratiques de l’agriculture biologique. Il est important que chaque agriculteur américain respecte les agriculteurs voisins qui effectuent des choix différents des leurs.

Cette analyse fait 5 recommandations qui traitent entre autres des points suivants :

  • la comparaison des mécanismes de compensation pour les pertes potentielles à ceux des programmes d’assurance-récolte;
  • la mise en place de projets pilotes, de façon concertée avec les agriculteurs et les autres acteurs concernés (compagnies, associations de producteurs, gouvernements locaux, services d’éducation, etc.);
  • l’éducation sur les paramètres de coexistence;
  • le financement de recherches sur la quantification des pertes réelles des agriculteurs en fonction des paramètres géographiques, sur les éléments possibles de contamination à la ferme et post-récolte, sur les méthodes de confinement des flux géniques, etc.;
  • les moyens d’assurer une offre suffisante de semences non-GM pour les producteurs qui le désirent.

Cinq grands principes-clés pour une coexistence efficace sont recensés1 2 3

  1. Contexter
    • Bien circonscrire et situer ce qui est biologique, conventionnel et OGM (superficie et localisation).
    • Déterminer l'importance économique relative au niveau commercial et agronomique des différents systèmes de production.
    • Estimer quel matériel sous forme de présence adventice (PA) peut nuire à quel type de production.
  2. Cohérence et régularité
    • Les producteurs doivent être cohérents avec la pureté et l'intégrité du matériel et des dérivés non désirés.
    • Des seuils adéquats pour la PA doivent être établis.
    • Le plus souvent ces seuils sont en lien avec le risque d'un composé pour la santé (ex. : résidus pesticides, mycotoxines, etc.).
  3. Proportionnalité des mesures
    • Les mesures établies favorisant la coexistence doivent être non discriminatoires et basées sur des faits scientifiques et techniquement réalisables.
  4. Équité et impartialité
    • Les désavantages économiques ne doivent pas être confondus avec les responsabilités environnementales.
    • Les mesures de coexistence ne concernent que les risques économiques liés aux pertes de marchés et aux impacts des mélanges GM/non GM.
    • Les mesures de coexistence doivent être du même ordre pour tous les types de production.
    • Tous les créneaux doivent être analysés pour leurs avantages (ex. : conventionnel, biologique, sans intrants, OGM avec avantages santé, OGM avec moins de mycotoxines).
  5. Facilité d'utilisation des mesures
    • Les aspects légaux, techniques et scientifiques doivent être pratiques et clairement expliqués à tous les intervenants.
    • Une pureté absolue des produits ségrégés est idéalement voulue. Toutefois, les systèmes de production agricole ont des impuretés accidentelles qui peuvent être rarement évitées. Un niveau de pureté de 100 % est non réaliste et impraticable.

Une ségrégation parfaite est-elle possible ?

L’agriculture est un processus ouvert : une ségrégation parfaite des différents types de production est en pratique impossible. Les problèmes de coexistence des cultures sont le plus souvent reliés à deux facteurs, soit la pollinisation croisée ou les mouvements pendant la récolte et la post-récolte.

La présence adventice d’OGM devient alors soit évitable, selon les mesures mises en place, ou techniquement inévitable malgré les mesures en place.

La problématique de coexistence va être différente et variée en importance selon le type de culture GM.